La fête nationale en Biélorussie ou la démonstration de la politique du président biélorusse Loukachenko
La Fête nationale se déroule le 3 juillet en Biélorussie. Ce jour-là, cet ancien pays du bloc soviétique célèbre sa victoire sur l’Allemagne nazie, en commémorant la libération de Minsk. Nous avons eu l’occasion d’assister à la grande parade militaire lors de notre voyage en 2016. L’ occasion d’en apprendre un peu plus sur ce singulier pays de l’Est et sur son pouvoir autoritaire en place.
Une célébration à Minsk dans la capitale de la “dernière dictature d’Europe”
Après la chute de l’URSS en 1991, la République du Bélarus est l’un des rares ex-pays du bloc soviétique à avoir conservé les symboles des révolutions bolchéviques.
Marteau, faucille, et figure de Lénine, les symboles communistes en Biélorussie
Un véritable culte héroïque s’est constitué autour de la période de la « Grande guerre patriotique » (1941-1945). Lors de notre voyage en 2016, nous avons pu constaté que les monuments commémoratifs à la gloire des partisans et de l’armée rouge sont omniprésents à travers le pays.
On trouve gravée sur les bâtiments à l’architecture stalinienne, le marteau, la faucille, l’étoile rouge et de nombreuses statues de Lénine sont encore debout. Celles de Staline (l’une d’elle se trouvait notamment sur la place d’octobre à Minsk) ont été déboulonnées.
Le Bélarus, une république post-soviétique entre UE et Russie
Tous ce symboles semblent rappeler l’attachement au communisme ou plutôt au socialisme soviétique.
Les célébrations auxquelles nous assistions soulignent paradoxalement une autre émancipation, celle vis a vis de l’URSS en 1991.
Il n’y a pas d’opposition au sein de la République du Bélarus et les critiques du régime sont systématiquement et durement réprimées. Cela est le cas en 2020 à Minsk.
C’est pourquoi on appelle la Biélorussie, la dernière dictature d’Europe, même si paradoxalement, le pays n’est pas complètement replié sur lui-même et entretien des liens avec l’Union Européenne, mais surtout avec la Russie dont dépend une grande partie de ses ressources.
Journée de l’indépendance contre Journée des Libertés en Biélorussie
Pour certains biélorusses, la fête nationale devrait se dérouler le 25 mars, une date qui correspond à la naissance République populaire biélorusse (RPB) en 1918. Mais ce n’est pas le choix du président Loukachenko. Ce jour là la population qui manifeste est systématiquement arrêtée.
Fête folklorique et parades pour la fête nationale à Minsk
Lors de la fête de l’indépendance du 3 juillet, des fêtes folkloriques ont lieu partout dans le pays. À Minsk, la parade miliaire constitue le temps-fort des célébrations. Dès 8 heures, une petite foule se presse le long de l’avenue pour assister à la grande parade militaire.
Des festivités très encadrées par le régime autoritaire
La cigogne – autre emblème du pays – a les ailes déployées, les femmes ont revêtue le vêtement traditionnel pour les parades, les enfants et les hommes aussi. Le tout se déroule dans une ambiance bon enfant, sous l’oeil attentif des différents services d’ordre (militaires, KGB, service de sécurité, police de proximité).
Les festivités avaient commencé la veille avec quelques concerts de groupes autorisés, des représentations de la jeunesse, des démonstrations de sport et des chants patriotiques. L’occasion pour la République du Bélarus de mettre en avant également le folklore du pays. Mais les effusions de joie sont contenus.
Le contraste et saisissant entre le calme et la discipline des habitants et le dispositif déployé. On sent que les festivités sont très encadrées.
L’opposition politique fuient les célébrations
Si officiellement tout le monde se réjouit de ce jour, qui célèbre la patrie et ses symboles, une part importante des habitants de la capitale préfèrent fuir les désagréments provoqués par les festivités (rues coupées, circulation difficile, agitations sonores) et aller se reposer dans leur datcha ce week-end là.
C’est ce que nous ont confié certains habitants, certains qui ne cachent pas leur désapprobation quant aux à la débauche de moyens, au regard de la situation économique du pays.
Coups de canon et corps d’armées
Chacun passe par un portique et une fouille au corps. Le long des barrières, les spectateurs sont soigneusement encadrés par un dispositif de sécurité omniprésent qui contraste avec le calme manifeste des spectateurs.
Les immeubles et hôtels alentours ont été priés de fermer fenêtres et rideaux. Les coups de canon sont suivis de la revue des différents corps d’armées. Nous ne ressentons pas la même effervescence que l’on peut trouver dans d’autres pays pendant la fête nationale.
Un défilé militaire comme épreuve de force
Le défilé se déroule ensuite selon des cadences millimétrées avec des formations impeccables et des chorégraphies militaires d’une synchronisation parfaite. Les chars et les avions défilent sur l’avenue faisant un bruit assourdissant lors de leur passage.
Les hélicoptères et engins d’aviation en formation déchirent le ciel crachant des fumées aux couleurs de la République du Bélarus, suscitant l’enthousiasme de la foule. Puis arrive la voiture présidentielle, avec à son bord, le président Alexandre Loukachenko, élu depuis 1994. Il s’agit clairement pour le régime d’une démonstration de force.
Des chaînes de télévisions nationales sous contrôle
La première chaîne de télévision – Bélarus 1 – retransmet l’évènement qui se tient en direct sur l’avenue Pieramožcaŭ de Minsk. Il s’agit d’une chaîne d’État, comme le reste du bouquet télévisuel.
Il n’existe pas de chaîne privée au Bélarus. Une édition spéciale a lieu à l’occasion des 25 ans de l’indépendance du pays vis-à-vis de l’URSS. C’était pourtant avec une rigueur toute soviétique que le Bélarus célèbre ce jour.
Que représente le drapeau en Biélorussie ?
Le jour de l’indépendance, les grandes artères de la ville, notamment l’avenue de l’Indépendance « Nezavisimosti », se parent des couleurs du drapeau de la République du Bélarus. Rouge et vert avec un liseré rappelant les bordures du vêtement traditionnel biélorusse. Celui-ci a été adopté en 1995, à la première élection du président Alexandre Loukachenko.
Sur la décision de ce dernier, il a remplacé le drapeau blanc-rouge-blanc choisi au moment où le pays s’est déclaré indépendant de l’Union soviétique en 1991.
Le rouge et blanc couleur des opposants politiques à l’état autoritaire
C’est ce drapeau, de couleurs rouge et blanc que les opposants au régime biélorusse et la population utilisent comme signe de ralliement depuis 2020, lors des manifestations contre le régime du Président Loukachenko.
Le président Alexandre Loukachenko : une figure de plus en plus critiquée par le peuple
S’affichant comme une personnalité issue et proche du peuple, il est une figure respectée par une part non négligeable de population qui voit en lui l’homme capable d’apporter la stabilité et la prestance auxquelles aspire le pays depuis la guerre.
Une aura dont il bénéficie encore aujourd’hui, notamment chez les anciennes générations et les habitants des campagnes – qui concentrent la plupart du pays – reste nostalgiques de l’Union soviétique.
L’UE (Union européenne) ne reconnaît pas le résultat de l'élection présidentielle de 2020 en Biélorussie
Une nouvelle élection présidentielle biélorusse a lieu le 9 août 2020. Le président sortant Alexandre Loukachenko, y briguait un sixième mandat depuis sa première élection en 1994.
Il a été réélu avec 80,08 % des suffrages face à la candidate d’opposition Svetlana Tikhanovskaïa (qui remplaçait son mari, Sergueï Tikhanovski, emprisonné par le régime.
Cette élection controversée et non reconnue au sein de l’UE, en raison de lourds soupçons de fraudes a déclenché d’importantes manifestations à Minsk, toujours en cours.
Les répressions du régime n’ont jamais été aussi lourdes (répressions violentes des manifestations pacifiques, emprisonnements, enlèvements, disparitions de figures d’oppositions et de civils).