Faut-il visiter Tchernobyl ? On a testé le tourisme noir

Nous nous sommes rendus dans le village de Prypiat en Ukraine, situé à 4 kilomètres de la centrale nucléaire de Tchernobyl. C’est aujourd’hui une ville fantôme dans la zone d’exclusion. Avec l’avénement du « tourisme noir » et de l’urbex, des agences privées font aujourd’hui le business autour du tristement célèbre accident de Tchernobyl, du 26 avril 1986. Bon ou mauvais tourisme ?  Après un déroulé des évènements, on fait le point sur notre expérience.


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(Ajout d’informations le 10 avril 2020) 

Les forêts des villages en feu

En pleine épidémie de Coronavirus (Covid-19), voici une information dont on a peu entendu parler. Le 4 avril, un incendie s’est déclaré “dans la zone boisée entre le village de Poliske et le village de Volodymyrivka, sur une superficie d’environ 6,5 hectares, et près du village de Roudnya Ossochnya, sur une superficie d’environ 4 hectares” comme le rapporte le journal Oukraïna Molda.

Dans la zone du pire accident nucléaire de l’Histoire, la question de la radioactivité à travers les masses d’air et de ses conséquences en Europe et en France se pose (notamment dans l’Est).

Radioactivité : une hausse du taux en France ?

L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) se veut rassurant dans cette note d’information : ” Les niveaux d’activité attendus dans l’air en France en césium 137 devraient être très faibles, voire non mesurables. De tels niveaux sont sans conséquence pour la population et l’environnement”. Des mesures sont en cours et seront publiées dans les jours qui viennent.

La police de Kiev a annoncé avoir interpellé un jeune homme de 27 ans qui a avoué “avoir mis le feu pour s’amuser” explique l’article de Courrier International.


L’accident de Tchernobyl 

Le 26 avril 1986, une mauvaise manipulation lors d’un exercice provoque une explosion à l’intérieur du réacteur n°4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl en Ukraine. Un épais nuage radioactif se propage dans le ciel, touchant également les pays limitrophes, dont la Biélorussie toute proche.

Gestion de l’accident nucléaire par l’URSS

L’Union des républiques socialistes soviétiques ayant minimisé l’ampleur de la catastrophe en tardant à réagir, c’est le gouvernement de Suède qui donna l’alerte, constatant un taux anormal de radioactivité dans l’air ambiant quelques jours après l’explosion.

Une évacuation tardive de la zone

La zone située autour de la centrale n’a commencé à être évacué qu’un jour après l’explosion, malgré des retombés radioactives et ses risques sur la santé  évidentes. Il est admis que l’accident de Tchernobyl et sa gestion chaotique par les autorités ont précipité la chute de l’URSS.

Conséquences : combien de morts ?

Le bilan humain réel de la catastrophe de Tchernobyl est difficile à certifier et fait l’objet d’une bataille de chiffres. Les chiffres varient de milliers à plusieurs millions de victimes !

La relation entre l’exposition aux radiations de Tchernobyl et les pathologies (cancers, leucémies, maladies cardiaques…) et les décès qui sont développé après sont indéniables, mais difficilement corrélables / prouvable. D’où la difficulté de tirer un bilan exact.

Les pompiers et volontaires en première ligne

Les principales victimes sont les pompiers et 600 000 volontaires – les « liquidateurs » –  qui se sont rendus sur place pour nettoyer la zone, immédiatement et après l’accident. Parmi eux, beaucoup sont morts quelques jours plus tard, à la suite de leur exposition aux intenses radiations. Les estimations vont de 200 à … 25 000.

Les enfants de Tchernobyl

Beaucoup sont des victimes non immédiates de la catastrophe nucléaires.  Ils ont été contaminées par les radiations jugées responsables de malformations, de handicaps moteurs ou mentaux, et surtout de cancers, leucémies et de problèmes de thyroïde.

Parmi eux, des enfants ukrainiens et biélorusses qui souffrent, une génération plus tard, des conséquences probables de Tchernobyl.

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Comment entrer dans la zone d’exclusion de Tchernobyl ?

Que reste-il 30 ans après du plus grand accident nucléaire civil du 20ᵉ siècle ? Peut on se rendre à Tchernobyl ?  Oui. Depuis 2011, des guides touristiques proposent au départ de Kiev (la capitale d’Ukraine) des excursions dans la zone d’exclusion de Tchernobyl en visite groupée.

De nombreux pillages

Zone d’exclusion signifie qu’aucun civil – en théorie – n’est autorisé à y vivre, depuis l’évacuation du village. Mais certains habitants notamment des anciens, des babouchka, comme on les appelle, sont revenus habiter dans la ville de Tchernobyl en dépit de l’interdiction en vigueur de l’Etat. Il est aussi interdit de prélever des objets sur le site mais les lieux ont été pillés à de nombreuses reprises.

Est-il dangereux de visiter Tchernobyl ?

En théorie, ne passer que quelques heures dans la zone d’exclusion est sans danger. Les brochures informatives et les guides le répètent pour rassurer les touristes : l’exposition aux radiations durant la visite est par exemple, largement inférieure à celle à laquelle est exposé un passager d’un vol Paris-New-York.

Le compteur Geiger s’affole par endroits !

Les règles de sécurité sont cependant strictes et une décharge de responsabilité est signée par chaque visiteur à l’entrée du site. Les guides connaissent les lieux où sévissent les plus forts taux de radiation. Ce sont notamment les endroits où ont été enterrées profondément les souches les plus sensibles. Le compteur Geiger – qui mesure le taux de radioactivité en sieverts – s’affole alors.

Le site n’est pas aussi désert que ça…

C’est difficile à imaginer, mais des milliers de personnes travaillent dans la zone d’exclusion de Tchernobyl. Si l’activité nucléaire est aujourd’hui abandonnée – les réacteurs en construction lors de l’accident de Tchernobyl ne seront d’ailleurs jamais terminés – seuls les scientifiques et ouvriers travaillent dans la zone contaminée. Leur travail fait l’objet d’un strict protocole. Les effets d’une exposition régulière sur la santé des hommes son en effet méconnus.

Un site de Tchernobyl très encadré et surveillé

Le site de Tchernobyl fait l’objet d’une stricte surveillance. Deux checkpoint existent. Le premier se trouve dans le rayon d’exclusion des 30 kilomètres autour de la centrale, Le second est situé dans un rayon de 10 kilomètres. Seuls les scientifiques et les travailleurs sur le site sont en principe autorisés à y pénétrer.

Sous les portiques de contamination

Pendant le voyage en bus de deux heures depuis Kiev qui nous conduit à la zone d’exclusion, des informations sur le contexte de la catastrophe et les règles de sécurité à observer nous sont données.

À la sortie de Tchernobyl, nous passerons sous des portiques de contrôle afin de vérifier qu’aucun de nos effets personnels ne soient contaminés. Si tel est le cas, nous aurions dû les laisser sur place.

Prypiat, village fantôme

La visite de groupe vous fera découvrir Tchernobyl et Prypiat , situé à 4 kilomètres du réacteur et évacué de nombreuses heures après l’incident reste un témoignage macabre de l’ampleur du désastre. C’est aujourd’hui une ville fantôme. Son existence exerce toutes sortes de réactions chez le visiteur / touriste pour le moins contradictoires, entre tristesse, colère, désolation, voire même fascination. 

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Stade, gymnase et piscine à l’abandon

Inaugurée dans les années 1970, elle était considéré comme une ville « modèle » de l’Union soviétique. L’ancien stade de Pripyat, le gymnase, la piscine (la piscine), les murs se sont en partie effondrés, la peinture s’est effritée et le matériel a été abandonné.

Grande roue et parc d’attraction en vestiges

La grande roue et les autos-tamponneuses de la ville de Prypiat sont les images symboliques des vestiges que l’on retient le plus parmi ce paysage désolé. L’inauguration du parc devait avoir lieu quelques jours après l’accident

Réalité ou mise en scène macabre ?

Ambiance apocalyptique dans les bâtiments touchés par la catastrophe. Beaucoup d’objets ont été abandonnés parmi les décombres et donnent l’impression d’avoir été laissés dans la précipitation.

Pourtant, la zone de Tchernobyl n’a été évacuée que 30 heures après l’explosion de la centrale. Les habitants ont donc eu largement d’organiser leur départ. Il est donc difficile de différencier la mise en scène macabre et la réalité.

Antennes Duga-1 : le pic-vert-russe

Dans la zone d’exclusion des 30 kilomètres. Ce bouclier antimissile – aujourd’hui abandonné – devait détecter une éventuelle attaque américaine, dans un contexte de Guerre froide au cours duquel le bloc de l’Est affrontait le bloc de l’Ouest.

Le pic-vert, tel qu’il était appelé en raison de son bruit, témoigne du climat d’hostilité qui régnait à l’époque et des priorités définies par le gouvernement soviétique dans les années précédant la catastrophe de Tchernobyl.

Tchernobyl en 2020 : un nouveau sarcophage

Le site est toujours en cours de sécurisation. Il le sera probablement pour l’éternité. Un nouveau sarcophage pour le réacteur n°4 a été bâti et sera installé au cours du mois de novembre 2016. L’enveloppe précédente, construite à la suite de la catastrophe dans la précipitation, présente des fissures qui empêchent l’isolation optimale du réacteur.

Une réserve pour la biodiversité

Des arbres poussent dans les maisons, devant les façades des anciens immeubles d’habitation, en travers de la route… Au milieu de ce décor macabre, la nature a immanquablement repris ses droits.

Faut-il payer et visiter Tchernobyl ? Notre avis !

C’est ce que certain appel l’avénement du tourisme nucléaire, du tourisme noir, ou du tourisme sensationnaliste.  Auparavant, les visites se faisaient de façon plus ou moins légales. La tenue de l’Euro 2012 en Ukraine a forcé les autorités ukrainiennes à encadrer et sécurisé ce type d’excursions. Il ne faut pas se leurrer représente une manne financière pour le pays.

Les dérives du tourisme de masse ?

Le contraste entre tourisme sensationnaliste et informations délivrées varie selon le type de visite choisi. Ce qui est sûr, c’est que le site de Tchernobyl provoque toutes sortes de réactions : de la tristesse à la fascination. Le problème reste les dérives de l’ère moderne avec le tourisme de masse : selfies, vidéos, poses…

Une baignade dans des eaux radioactives

Mais pour être honnêtes, nous avions imaginé davantage de dérives. Nous avons réalisé cette visite via l’agence Chernobyl Tour, notre guide était intéressante et notre groupe – composé de touristes chinois, américains… – était plutôt discipliné et respectueux des lieux.

Sur le site, nous avons néanmoins croisé deux adolescents en quête de sensationnalisme qui se sont baignés dans la rivière Pripat (Pripet en ukrainien).

Si vous nous connaissez, vous savez que nous sommes curieux de nature (c’est l’essence même du voyage et des rencontres). Alors selon nous, oui il est utile de visiter Tchernobyl et même si c’est via une agence privée et par le biais de visite organisée car c’est la seule manière légale et sécurisée.

Voir pour comprendre l’Histoire

Découvrir de ses propres yeux là où s’est déroulé la propre catastrophe nucléaire de l’Histoire nous semble utile pour comprendre. Dans l’imagerie commune, on représente souvent le sujet via des photographies de Pripyat.

Mais Tchernobyl c’est aussi aujourd’hui – on le sait moins – de nombreux ouvriers et scientifiques qui travaillent sur place,  et une faune et une flore qui a repris vie. Nous avons tous des clichés réducteurs en tête – véhiculés par les médias et les réseaux sociaux – lorsqu’on parle de certains évènements, de lieux, de destinations…

C’est cette volonté d’aller voir de nous-mêmes sur le terrain et de vous partager nos ressentis qui a donné l’envie lieu à la réalisation de ce reportage en espérant vous avoir fait découvrir d’autres facettes de cet évènement historique. N’hésitez pas à nous donner vos impressions en commentaire.

Pauline & Simon

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